Dossier judiciaire reconstitué par les lycéens


de François 1er


 

 

Cour d’Assises

 

Procès en appel de Jules Durand


5 juin 2015

 

 

Palais de Justice du Havre

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DOSSIER JULES DURAND

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

1/ Les pièces de fond

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PROCES-VERBAL

d'INTERROGATOIRE de

PREMIERE COMPARUTION

 

COUR D'APPEL DE

     ROUEN

 

   TRIBUNAL DE

GRANDE INSTANCE

    DU HAVRE

 

   CABINET DE

 GEORGES VERNYS

 JUGE D'INSTRUCTION

                                               N° DU PARQUET : 12-031234

                                               N° INSTRUCTION : 9/12/13

 

Vu l'article 116 du Code de Procédure Pénale,

 

Le 11 septembre 1910 (15h00)

 

Devant Nous, Georges VERNYS, juge d'instruction au tribunal de grande instance du HAVRE, étant en notre cabinet, assisté de Jean LESUEUR greffier.

 

A comparu la personne, qui nous fournit les renseignements d'identité suivants :

 

M. DURAND , Jules, Gustave

Né le 6/10/1880 à LE HAVRE – Majeur

Adresse déclarée : 51 quai de Saône LE HAVRE

Profession : ouvrier charbonnier

Situation familiale : Divorcé. Aucun enfant. Vit chez ses parents avec une nouvelle conjointe.

Nationalité : Française

Antécédents judiciaires : jamais condamné

Qui déclare savoir lire et écrire en langue française.

Après avoir constaté l'identité de la personne, nous lui faisons connaître expressément chacun des faits dont nous sommes saisis en vertu d'un réquisitoire introductif de M. Le Procureur de la République, en date du 23 octobre 1910, pour lesquels elle comparait devant nous :

 

QUESTION: Ainsi donc, vous niez ? ... Je vous demande de répondre dans votre intérêt.

RÉPONSE: Mais c'est à ne rien y comprendre, monsieur le juge. Tout cela n'est qu'un tissu de mensonges, je suis innocent de tout ce qu'on m'accuse... Des mensonges

QUESTION: Savez-vous que j'ai là les témoignages de dix charbonniers qui vous accablent tous sans la moindre exception ?

RÉPONSE:Des mensonges ...Ils mentent tous !

QUESTION: Un, ce serait possible mais dix ? Dix témoignages qui concordent sur tous les points. Je ne vous cache pas que c'est accablant.

 

RÉPONSE: Mais vous allez en trouver cent et plus sur le port qui vous diront le contraire! Je faisais tout mon possible pour éviter les incidents, les affrontements, je calmais les plus surexcités, je recommandais le calme, je ...  QUESTION:J'irai Durand, j'irai... mais quelle valeur donner à leurs propos ? De toute manière, ils ne vont pas avouer avoir voté la mort de Dongé, ce serait être complice à leur tour.

RÉPONSE:Et les autres, ils racontent n'importe quoi et vous les croyez !

QUESTION:Pas n'importe quoi. J'ai trouvé des hommes effrayés par la violence qui règne sur les quais. <Une ambiance sanguinaire>, titre le journal ce matin, et c'est vrai. J'ai la liste de toutes les plaintes déposées depuis le début de votre mouvement: charretiers battus, voitures sabotées,  Menaces contre les antigrévistes, provocation en tous genres, c'est impressionnant Convenez-en Durand, l'atmosphère est difficilement respirable sur le port en ce moment.

 

RÉPONSE:Et tout ça à cause de nous, jamais à cause des patrons! Ils refusent toute concertation, ils nous exploitent, ils nous affament avec leurs machines, et …

QUESTION: Ce n'est pas mon affaire, la politique n'entre pas dans ce bureau. Et puis ces dix témoins, ce ne sont pas des patrons, ils sont charbonniers comme vous.

RÉPONSE:Mais contre la grève !

 

QUESTION:Justement! Quel est leur intérêt dans cette malheureuse histoire? Ils prennent des risques au contraire. Accuser le secrétaire général du syndicat des charbonniers d'avoir ordonné un assassinat, vous vous rendez compte? Ils ont peur maintenant, ils craignent des représailles, mais, comme l'a dit Louis Leprêtre, la mort de Dongé, c'est trop...  Ils sont très bien notés par leur employeur. Tout comme ce pauvre Dongé, d'ailleurs.

REPONSE: Ils ont voulu se venger, c'est tout.

 

QUESTION: Allons, allons, Durand … … … pas les dix

RÉPONSE: Et vous me croyez assez stupide pour avoir fait voter la mort de Dongé en pleine assemblée générale, par six cents charbonniers? C'est donc que je serais le roi des imbéciles

 

QUESTION:J'ai vu pire, bien pire, figurez-vous. Je vais vous dire ce que je pense, car il faut bien que l'on avance, n'est-ce-pas? Des syndiqués vous lâchaient, votre mouvement s’essoufflait, déclinait, tout porte à croire que vous étiez vaincus. Vous étiez sur les nerfs, en proie à une effroyable sensation d'échec. Après tant de jours et tant de sacrifices, c'était dur, n'est-ce-pas? Or Louis Dongé figurait parmi vos principaux adversaires, ce chef de bordée s'opposait avec virulence à la grève, il était un traître à votre cause et … 

RÉPONSE: Dongé …

 

QUESTION:Ils l'affirment tous, ils expliquent également que Dongé et quelques autres charbonniers sont venus apporter la contradiction à l'un de vos meetings et que ça s'est mal passé, qu'une violente bagarre a éclatée…

RÉPONSE:Il était complètement ivre,comme souvent !

QUESTION: Ça ne figure nulle part dans les dossiers.

RÉPONSE: Mais c'est moi qui l'ai autorisé à prendre la parole, car j'estime qu'aucune opinion ne doit Être interdite dans une assemblée démocratique, mais il s'est moqué de nos camarades charbonniers, les a menacés, et bien sûr, cela a dégénéré…  Je vous l'ai dit, il était complètement soûl.

QUESTION: C'est là que vous avez perdu votre sang-froid, Durand, que vous avez clairement déclaré qu'il fallait < supprimer> Dongé…

RÉPONSE: Mais, mais … mais le <supprimer du syndicat>! Le rayer, l'exclure des effectifs, tout simplement! Comment aurais-je pu ordonner la mort de Dongé? Comment pouvez-vous imaginer que …

QUESTION:Mais je n'imagine rien! Je vous le répète, j'ai là dix témoignages qui affirment le contraire, dix charbonniers qui vous ont vu et entendu ordonner l'assassinat de Louis Dongé, qui décrivent le vote et donnent tous les détails! Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise, Durand? Je ne les ai pas inventés! J'étais venu sur le port pour une bagarre d'ivrogne, et je trouve l'agent général de la Compagnie générale transatlantique et son chef de la manutention du charbon qui m'annoncent que dix charbonniers demandent spontanément à me rencontrer. Je n'ai même pas eu à enquêter, à me renseigner, et dans une telle affaire, c'est plutôt rare, croyez-moi!  RÉPONSE: Attendez, monsieur le juge …

QUESTION: oui ?

RÉPONSE:Les dix, ils ont tous de la Transat?

QUESTION: Effectivement … et qu’est-ce que ça change?

RÉPONSE: Et c'est bien le directeur de la compagnie qui vous a orienté vers eux?

 

QUESTION: Exact. Lui et son adjoint, un ingénieur, M.Delarue, si je ne m'abuse.

RÉPONSE: Et les quatre hommes qui se sont battus avec Dongé, ont-ils avoué avoir agi sur mon ordre?_

 

QUESTION:Ah eux ! … Eux, ils ont avoué … Mais bon, ils ne souviennent pas très bien, prétendent que Dongé les a menacés d'un pistolet, qu'on n'a pas retrouvé bien entendus … Ils se sont battus, parlent d'un coup malheureux, se rejettent les responsabilités, c'est classique … Mais, là encore, des témoins affirment le contraire. Vos complices se sont acharnés sur Dongé avec une violence inouïe.

RÉPONSE: M'ont-ils impliqués?

 

QUESTION: Je n'ai pas à vous répondre, pas encore. Mais ce sont vos amis, vos complices …

RÉPONSE: Je ne les connais même pas!

QUESTION: Mais ils vous connaissent, eux. Ce sera tout pour aujourd'hui. Greffier ?

RÉPONSE: Je ne signerai rien , monsieur le juge.

 

QUESTION: Comme il vous plaira. Je crois savoir qu'un avocat va prochainement vous assister; Me René Coty, c'est ça ?

RÉPONSE: Oui.

QUESTION: Très bien, tout sera plus clair.

RÉPONSE: J'ai encore une déclaration à faire.

QUESTION: Très bien, Greffier?

RÉPONSE: Je suis innocent, monsieur le juge, et s'il y a un traquenard, c'est contre ma personne. Nos adversaires veulent faire passer une banale bagarre d'ivrognes, un crime de hasard, pour un règlement de compte entre grévistes et antigrévistes Ce complot a été inventé, monté de toutes pièces par les ennemis de la classe ouvrière qui s'exaspéraient de notre combat. A travers moi, monsieur le juge, c'est le syndicat que l'on veut abattre.

QUESTION: Fort bien,Durand, fort bien … Avez-vous besoin de quelque chose d'autre, un besoin particulier ?

RÉPONSE: Du linge de rechange

QUESTION: Bien entendu, je vais faire prévenir votre famille.

RÉPONSE: Pour ma famille, les visites …

 

QUESTION:Ne vous en faites pas, votre avocat va s'occuper de tout ça.

RÉPONSE: Je suis innocent, monsieur le juge

 

QUESTION: Vous êtes libre d'afficher votre conviction. Mais j'ai aussi la mienne, la fameuse et intime conviction du juge d'instruction … Mais contrairement à vous je m'appuie sur des preuves tangibles.

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PROCES-VERBAL

d'INTERROGATOIRE de

PREMIERE COMPARUTION

 

COUR D'APPEL DE

     ROUEN

 

   TRIBUNAL DE

GRANDE INSTANCE

    DU HAVRE

 

   CABINET DE

 GEORGES VERNYS

 JUGE D'INSTRUCTION

                                               N° DU PARQUET : 12-031234

                                               N° INSTRUCTION : 9/12/13

 

 

 

Vu l'article 116 du Code de Procédure Pénale,

 

Le 11 septembre 1910 (16h00)

 

Devant Nous, Georges VERNYS, juge d'instruction au tribunal de grande instance du HAVRE, étant en notre cabinet, assisté de Jean LESUEUR greffier.

 

A comparu la personne, qui nous fournit les renseignements d'identité suivants :

 

M. BOYER , Louis, Gaston

Né le 25/03/1879 à SAINT ROMAIN DE COLBOSC – Majeur

Adresse déclarée : 23 rue Dumont d'Urville LE HAVRE

Profession : ouvrier charbonnier

Situation familiale :Marié. 3 enfants à sa charge.

Nationalité : Française

Antécédents judiciaires : jamais condamné

 

Qui déclare ne pas savoir lire et écrire en langue française.

 

Après avoir constaté l'identité de la personne, nous lui faisons connaître expressément chacun des faits dont nous sommes saisis en vertu d'un réquisitoire introductif de M. Le Procureur de la République, en date du 23 octobre 1910, pour lesquels elle comparait devant nous :

 

QUESTION: Asseyez-vous. Niez-vous avoir lors d'une assemblée générale fait voter la mort de Dongé ?

RÉPONSE: Bien sûr, nous sommes en colère contre les patrons qui nous affament et les traîtres qui nous mettent des bâtons dans les roues mais jamais nous avons incité au meurtre. Jamais !

QUESTION: Et Durand ?

RÉPONSE: Durand encore moins. C'est le plus pacifique d'entre nous. Il ne mettrait même pas les pieds au café pour une limonade si vous voyez ce que je veux dire.

QUESTION: Monsieur Boyer, il a pourtant déclarer qu'il fallait "supprimer" Dongé.

RÉPONSE: Mais il parlait bien évidemment de le rayer du syndicat. Dongé était souvent ivre et la dernière fois qu'il a pris la parole c'était pour se moquer de nous. Alors une bagarre a éclaté et Durand a pris la décision de le supprimer du syndicat. C'est tout, monsieur le juge, je vous le jure.

QUESTION : Fort bien ,fort bien, vous pouvez disposer mais sachez que j'ai des témoignages qui assurent tout le contraire de ce vous venez de me raconter.

REPONSE : Alors, ils sont faux !

QUESTION: Ce n'est pas à vous d'en juger, vous pouvez disposer.

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PROCES-VERBAL

d'INTERROGATOIRE de

PREMIERE COMPARUTION

 

COUR D'APPEL DE

     ROUEN

 

   TRIBUNAL DE

GRANDE INSTANCE

    DU HAVRE

 

   CABINET DE

 GEORGES VERNYS

 JUGE D'INSTRUCTION

                                               N° DU PARQUET : 12-031234

                                               N° INSTRUCTION : 9/12/13

 

 

Vu l'article 116 du Code de Procédure Pénale,

 

Le 11 septembre 1910 (17h00)

 

Devant Nous, Georges VERNYS, juge d'instruction au tribunal de grande instance du HAVRE, étant en notre cabinet, assisté de Jean LESUEUR greffier.

 

A comparu la personne, qui nous fournit les renseignements d'identité suivants :

 

M. BOYER , Ernest, Henri

Né le 4/10/1877 à SAINT AUBIN ROUTOT – Majeur

Adresse déclarée : 43 rue De Montivilliers LE HAVRE

Profession : ouvrier charbonnier

Situation familiale :Marié. 2 enfants à sa charge

Nationalité : Française

Antécédents judiciaires : jamais condamné

 

Qui déclare ne pas savoir lire et écrire en langue française.

 

Après avoir constaté l'identité de la personne, nous lui faisons connaître expressément chacun des faits dont nous sommes saisis en vertu d'un réquisitoire introductif de M. Le Procureur de la République, en date du 23 octobre 1910, pour lesquels elle comparait devant nous :

QUESTION: Bien, reconnaissez-vous lors d'une assemblée générale du syndicat avoir fait voter la mort de Dongé ?

RÉPONSE: Non, jamais en aucune façon !

QUESTION: Pourtant, Dongé était un traître à votre cause. Non gréviste, il avait je crois déclenché une bagarre au cours d'une assemblée. Il était l'homme à abattre.

RÉPONSE: Monsieur le juge, nous n'utilisons jamais la violence mais les mots pour faire entendre nos revendications. Même si nous ne portions pas Dongé dans nos cœurs, jamais nous n'aurions fait une telle chose.

QUESTION: Vous dites "nos cœurs", vous voulez sans doute inclure les autres charbonniers mais surtout votre frère et Durand. Ce dernier est peut-être l'instigateur de ce meurtre, car c'est ainsi qu'il faut l'appeler.

RÉPONSE: Durand est l'être le plus pacifique que je connaisse. Il est membre de la Ligue des Droits de l'Homme et les autres charbonniers le surnomment le "curé", alors il est impossible qu'il est fait voté la mort de Dongé. J'en suis certain.

QUESTION: N'a-t-il pas déclarer qu'il fallait le "supprimer"

RÉPONSE: Du syndicat, pardi ! Après cette bagarre il était hors de question qu'il continue à être membre du syndicat.

QUESTION: En êtes-vous sûr, j'ai là les témoignages de dix charbonniers qui m'assurent le contraire !

RÉPONSE: Ce sont de faux témoignages qui veulent faire tomber Durand et le syndicat. Mais, vous n'y prêtez pas attention j'espère ? Ils sont mensongers !

QUESTION: Vous n'allez pas m'apprendre mon métier, vous pouvez disposer.

 

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PROCES-VERBAL

d'INTERROGATOIRE de

PREMIERE COMPARUTION

 

COUR D'APPEL DE

     ROUEN

 

   TRIBUNAL DE

GRANDE INSTANCE

    DU HAVRE

 

   CABINET DE

 GEORGES VERNYS

 JUGE D'INSTRUCTION

                                               N° DU PARQUET : 12-031234

                                               N° INSTRUCTION : 9/12/13

 

 

 

Vu l'article 116 du Code de Procédure Pénale,

 

Le 10 septembre 1910 (10h00)

 

Devant Nous, Georges VERNYS, juge d'instruction au tribunal de grande instance du HAVRE, étant en notre cabinet, assisté de Jean LESUEUR greffier.

 

A comparu la personne, qui nous fournit les renseignements d'identité suivants :

 

M. MATHIEU, Edmond, Albert

Né le 2/03/1867 à LISIEUX – Majeur

Adresse déclarée : 4 rue Michel Yvon LE HAVRE

Profession : ouvrier charbonnier

Situation familiale :Célibataire. Aucun enfant.

Nationalité : Française

Antécédents judiciaires : jamais condamné

 

Qui déclare ne pas savoir lire et écrire en langue française.

 

Après avoir constaté l'identité de la personne, nous lui faisons connaître expressément chacun des faits dont nous sommes saisis en vertu d'un réquisitoire introductif de M. Le Procureur de la République, en date du 23 octobre 1910, pour lesquels elle comparait devant nous :

 

QUESTION: Que s'est-il passé exactement ?

RÉPONSE: Nous étions Couillandre, Lefrançois et moi sur le port. Nous avions un peu bu donc je ne me souviens pas ...

QUESTION: Faites un effort, vous êtes le principal suspect dans une affaire de meurtre ...

RÉPONSE: Un meurtre mais c'est ce salaud de Dongé. Il était là devant nous et il menaçait de son revolver. Alors ça a commencé a chauffé et on s'est battus je voulais pas le tuer mais il nous avait menacés, monsieur le juge , vous avez entendus menacé!

QUESTION: Un revolver dites-vous, nous n'en avons retrouvé

aucun.

RÉPONSE: Mais puis ce que je vous le dis ! Un revolver, il avait un revolver !

QUESTION: Calmez-vous, vous énervez ne ferait qu'empirer la situation dans laquelle vous vous trouvez actuellement. Vous avouez donc ?

RÉPONSE: Oui ...

QUESTION: Ce crime était-il prémédité ?

RÉPONSE: Non, monsieur le juge, je suis peut-être pas la personne la plus recommandable sur le port mais je ne suis pas un assassin.

QUESTION: Très bien, pouvez-vous me dire, le rôle des frères Boyer et de Jules Durand dans cette affaire ?

RÉPONSE: Aucun.

QUESTION: Allons, ce sont bien eux qui ont fait voté la mort de Dongé dans une de vos assemblées ?
RÉPONSE: Non, ils n'y sont pour rien.

QUESTION: Comme vous voulez, je découvrirai la vérité avec ou sans votre aide. Signez moi ce papier qui atteste que vous reconnaissez avoir tué le sieur Dongé.

RÉPONSE: Involontairement, monsieur le juge, involontairement !

QUESTION: Oui ,oui, bien sûr. Merci vous pouvez disposer.

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PROCES-VERBAL

d'INTERROGATOIRE de

PREMIERE COMPARUTION

 

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     ROUEN

 

   TRIBUNAL DE

GRANDE INSTANCE

    DU HAVRE

 

   CABINET DE

 GEORGES VERNYS

 JUGE D'INSTRUCTION

                                               N° DU PARQUET : 12-031234

                                               N° INSTRUCTION : 9/12/13

 

 

 

 

Vu l'article 116 du Code de Procédure Pénale,

 

Le 10 septembre 1910 (10h30)

 

Devant Nous, Georges VERNYS, juge d'instruction au tribunal de grande instance du HAVRE, étant en notre cabinet, assisté de Jean LESUEUR greffier.

 

A comparu la personne, qui nous fournit les renseignements d'identité suivants :

 

M. COUILLANDRE, François, Guillaume

Né le 14/05/1879 à PONT-CROIX (QUIMPER) – Majeur

Adresse déclarée : 27 rue Guillaume Letestu LE HAVRE

Profession : ouvrier charbonnier

Situation familiale :Célibataire. Aucun enfant.

Nationalité : Française

Antécédents judiciaires : jamais condamné

 

Qui déclare ne pas savoir lire et écrire en langue française.

 

Après avoir constaté l'identité de la personne, nous lui faisons connaître expressément chacun des faits dont nous sommes saisis en vertu d'un réquisitoire introductif de M. Le Procureur de la République, en date du 23 octobre 1910, pour lesquels elle comparait devant nous :

 

QUESTION: Pourriez-vous me raconter les faits ?

RÉPONSE: Eh bien, j'imagine que je n'ai pas le choix de toute façon! Nous étions sur le port et nous avions certes un peu bu mais nous ne faisions de mal à personne. Vous savez c'est pour oublier notre malheur, c'est pas facile tous les jours sur le port et les patrons y nous aident pas faut dire...

QUESTION: Poursuivez...

RÉPONSE: Comme je vous le disais on faisait de mal à personne mais y a ce traître de Dongé qui est arrivé. Il faisait le fier avec son revolver. Il nous a même menacés. Alors nous, on s'est pas laissé faire... On voulait pas le

tuer mais il était complètement ivre ...

QUESTION: Tout comme vous d’ailleurs Savez vous que l'on n'a pas retrouvé de revolver sur les lieux du crime ?

RÉPONSE: Il faisait ptêtre nuit mais je vous assure, il nous a bien menacé.

QUESTION: Alors peut-être attendiez-vous ce pauvre Dongé ?

RÉPONSE: Un guet-apens, ah ça non, c'est vrai qu'on l’aimait pas beaucoup mais on n'est pas des meurtriers.

QUESTION: Fort bien, vous faite partie du syndicat des charbonniers il me semble. Pouvez-vous me dire quel rôle ont joué les frères Boyer et jules Durand dans cette affaire ?

RÉPONSE: Le curé et les Boyer ! Ils n'ont rien à voir dans cette affaire, quelle idée étrange !

QUESTION:Ils n'ont pas fait voter la mort de Dongé dans une vos réunions?

RÉPONSE: Non jamais, vous savez Durand il recommande tout le temps le calme alors si y s'met à faire voter la mort de quelqu'un moi j'y comprends plus rien

QUESTION: Très bien, signez-moi ce papier attestant de votre participation dans cette malheureuse bagarre et vous pouvez disposer.

 

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PROCES-VERBAL

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     ROUEN

 

   TRIBUNAL DE

GRANDE INSTANCE

    DU HAVRE

 

   CABINET DE

 GEORGES VERNYS

 JUGE D'INSTRUCTION

                                               N° DU PARQUET : 12-031234

                                               N° INSTRUCTION : 9/12/13

 

 

Vu l'article 116 du Code de Procédure Pénale,

 

Le 10 septembre 1910 (11h00)

 

Devant Nous, Georges VERNYS, juge d'instruction au tribunal de grande instance du HAVRE, étant en notre cabinet, assisté de Jean LESUEUR greffier.

 

A comparu la personne, qui nous fournit les renseignements d'identité suivants :

 

M. LEFRANCOIS *, Charles, Onésiphore

Né le 25/02/1882 à LE HAVRE – Majeur

Adresse déclarée : 49 rue Berthelot LE HAVRE

Profession : ouvrier charbonnier

Situation familiale :Divorcé. 1 enfant qui n'est plus à sa charge.

Nationalité : Française

Antécédents judiciaires : jamais condamné

 

Qui déclare ne pas savoir lire et écrire en langue française.

 

Après avoir constaté l'identité de la personne, nous lui faisons connaître expressément chacun des faits dont nous sommes saisis en vertu d'un réquisitoire introductif de M. Le Procureur de la République, en date du 23 octobre 1910, pour lesquels elle comparait devant nous :

 

QUESTION: Bien, auriez-vous l'obligeance de m'exposer les faits ?

RÉPONSE: J'ai rien fait, j'ai rien fait...
QUESTION: Je crois que vous n'avez pas bien compris ma question. Je sais que vous étiez sur les lieux lors de cette bagarre qui a mal tourné. Alors, répondez-moi dans votre intérêt.

RÉPONSE: Nous... nous étions les copains et moi Quai d'Orléans. Vous savez dans notre vie c'est pas rose tous les jours alors on s'est un peu soûlé. Puis il y a eu Dongé qui est arrivé. Cet enfoiré était encore plus ivre que nous et

il faisait le fier avec un revolver. On lui a dit de ranger

ça et de déguerpir avant ça finisse mal pour lui. On lui voulait pas d'ennuis mais on allait pas se laisser menacer par ce traître. Comme il ne voulait pas partir, le ton est monté et ...

QUESTION: Merci, vous voyez ce n'était pas difficile. Mais ce fameux revolver dont vous me parlez n'a pas été retrouvé ?

RÉPONSE: Ah mais ça alors, je vous assure monsieur le juge que Dongé nous a bien menacés avec son arme.

QUESTION: Bien, continuons. Comme vous me l'avez dit précédemment vous et vos collègues n'aimiez pas beaucoup Dongé, alors vous l'avez attendu et l'avez supprimé. Le revolver est une pure fiction, vous permettant de plaider la légitime défense.

RÉPONSE: Mais non c'est faux nous ne voulions pas tuer Dongé. C'est lui qui a pointé son arme sur nous, c'est de sa faute s'il est mort.

QUESTION: Admettons, quel est le rôle des frères Boyer et de Jules Durand dans cette affaire ?

RÉPONSE: Les frères Boyer et le buveur d'eau ? Mais aucun, ils n'ont absolument rien à voir dans cette affaire!

QUESTION: Pourtant, ils ont bien fait voté la mort de Dongé dans une des assemblées ?

RÉPONSE: Non, ... Non, jamais. Je suis sûr.

QUESTION: Bien, ce sera tout pour aujourd'hui. Vous pouvez disposer.

 

 

* cf. rubrique "périple judiciaire" / "une seconde erreur judiciaire"

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PROCES-VERBAL

d'INTERROGATOIRE de

PREMIERE COMPARUTION

 

COUR D'APPEL DE

     ROUEN

 

   TRIBUNAL DE

GRANDE INSTANCE

    DU HAVRE

 

   CABINET DE

 GEORGES VERNYS

 JUGE D'INSTRUCTION

                                               N° DU PARQUET : 12-031234

                                               N° INSTRUCTION : 9/12/13

 

 

 

Vu l'article 116 du Code de Procédure Pénale,

 

Le 26 septembre 1910 (10h30)

 

Devant Nous, Georges VERNYS, juge d'instruction au tribunal de grande instance du HAVRE, étant en notre cabinet, assisté de Jean LESUEUR greffier.

 

A comparu la personne, qui nous fournit les renseignements d'identité suivants :

 

M. BAUZIN, Adolphe, François

Né le 14/04/1876 à LE HAVRE – Majeur

Adresse déclarée : 26 rue de Turenne LE HAVRE

Profession : ouvrier charbonnier

Situation familiale :Marié. 2 enfants.

Nationalité : Française

Antécédents judiciaires : jamais condamné

 

Qui déclare ne pas savoir lire et écrire en langue française.

 

Après avoir constaté l'identité de la personne, nous lui faisons connaître expressément chacun des faits dont nous sommes saisis en vertu d'un réquisitoire introductif de M. Le Procureur de la République, en date du 23 octobre 1910, pour lesquels elle comparait devant nous :

 

QUESTION: Alors, étiez-vous sur les lieux du crime cette nuit-là ?

RÉPONSE: Non, monsieur le juge, j'étais chez moi avec ma femme et mes deux enfants.

QUESTION: Vous savez ce que coûte une fausse déclaration ?
RÉPONSE: Non, mais je vous assure que j'étais chez moi ce soir là ?

QUESTION: Soit, faites-vous partie du syndicat des charbonniers ?

RÉPONSE: Oui.

QUESTION: Alors vous pourrez sans aucun soucis me confirmer que les frères Boyer et Jules Durand ont fait voter la mort de Dongé lors d'une

QUESTION: Alors vous pourrez sans aucun soucis me confirmer que les frères Boyer et Jules Durand ont fait voter la mort de Dongé lors d'une assemblée générale ?

RÉPONSE: Ah non, je ne rate aucune assemblée et je suis formel. Aucun des trois n'a jamais rien dit de tel. C'est vrai que ces des traîtres, ces foutus antigrévistes mais ils n'ont rien dit de tel.

QUESTION: Donc si je comprends bien vous êtes innocent et les frères Boyer et Durand aussi ?
RÉPONSE: C'est ça, monsieur le juge.

QUESTION: Votre innocence n'est pas complètement prouvée et je crois que vous irez tout de même devant les tribunaux. Merci, vous pouvez disposer.

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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PREMIERE COMPARUTION

 

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     ROUEN

 

   TRIBUNAL DE

GRANDE INSTANCE

    DU HAVRE

 

   CABINET DE

 GEORGES VERNYS

 JUGE D'INSTRUCTION

                                               N° DU PARQUET : 12-031234

                                               N° INSTRUCTION : 9/12/13

 

Vu l'article 116 du Code de Procédure Pénale,

 

Le 27 septembre 1910 (10h30)

 

Devant Nous, Georges VERNYS, juge d'instruction au tribunal de grande instance du HAVRE, étant en notre cabinet, assisté de Jean LESUEUR greffier.

 

A comparu la personne, qui nous fournit les renseignements d'identité suivants :

 

M. GEEROMS, Camille, Luc

Né le 9/11/1871 à FACHE – Majeur

Adresse déclarée : 25 rue Victor Hugo

Profession : ouvrier mouleur

Situation familiale :Marié. 3 enfants.

Nationalité : Française

Antécédents judiciaires : jamais condamné

 

Qui déclare  savoir lire et écrire en langue française.

 

Après avoir constaté l'identité de la personne, nous lui faisons connaître expressément chacun des faits dont nous sommes saisis en vertu d'un réquisitoire introductif de M. Le Procureur de la République, en date du 23 octobre 1910, pour lesquels elle comparait devant nous :

QUESTION : Alors, quel est votre sentiment sur cette affaire, monsieur Geeroms ?

REPONSE : Dreyfus, bien qu’innocent avait été condamné parce

que juif ; Durand bien qu’innocent, est condamné parce qu’il est le secrétaire du syndicat !

QUESTION : Voilà un avis  bien arrêté. Comment Duroy est-il dans son travail ?

REPONSE : C’était un homme intègre, dévoué à sa cause et tout à fait pacifique.

QUESTION : Intègre, mais qui comme nous tous souhaite atteindre ses objectifs. Les patrons lui refusent déjà ses revendications alors les antigrévistes comme Dongé qui lui mettent des bâtons dans les roues , il n'a pas supporté …
REPONSE : Monsieur le juge, écoutez bien ce que je vais vous dire. Dongé était une crapule de la pire espèce, une brute alcoolique. Pourtant Durand lors d'une assemblée générale l'a autorisé à prendre la parole. Si cela n'avait tenu qu'à moi, j'aurais sorti ce fauteur de trouble immédiatement. Mais Durand respecte chacun d'entre nous. Il donc pris la parole et nous tous insulté, Durand est resté impassible. Il ne supporte pas la violence, alors comment      aurait-il pu faire voter la mort de Dongé dans une assemblée devant des tonnes de témoins ?

QUESTION : Mais parce que les gens comme Dongé le gênait dans sa progression.

REPONSE : On ne supprime pas un homme pour cela aussi peu recommandable soit-il.

QUESTION : Et les frères Boyer ?
REPONSE : Je les crois aussi innocents !

QUESTION : Merci, ce sera tout. Vous pouvez disposer.

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

PROCES-VERBAL

d'INTERROGATOIRE de

PREMIERE COMPARUTION

 

COUR D'APPEL DE

     ROUEN

 

   TRIBUNAL DE

GRANDE INSTANCE

    DU HAVRE

 

   CABINET DE

 GEORGES VERNYS

 JUGE D'INSTRUCTION

                                               N° DU PARQUET : 12-031234

                                               N° INSTRUCTION : 9/12/13

 

 

Vu l'article 116 du Code de Procédure Pénale,

 

Le 27 septembre 1910 (11h30)

 

Devant Nous, Georges VERNYS, juge d'instruction au tribunal de grande instance du HAVRE, étant en notre cabinet, assisté de Jean LESUEUR greffier.

 

A comparu la personne, qui nous fournit les renseignements d'identité suivants :

 

M. DUCROT, Stanislas, Marie

Né le 19/06/1853 à PARIS – Majeur

Adresse déclarée : 46 rue d'Ingouville

Profession : ouvrier mouleur

Situation familiale :Marié. 0 enfant.

Nationalité : Française

Antécédents judiciaires : jamais condamné

 

Qui déclare  savoir lire et écrire en langue française.

Après avoir constaté l'identité de la personne, nous lui faisons connaître expressément chacun des faits dont nous sommes saisis en vertu d'un réquisitoire introductif de M. Le Procureur de la République, en date du 23 octobre 1910, pour lesquels elle comparait devant nous :

 

QUESTION : Bien monsieur Ducrot, merci d'avoir accepté de venir témoigné. Je n'ignore pas que vous avez un emploi du temps chargé, aussi je n'irai pas par quatre chemins. Que pensez vous de Durand en tant qu'employé.

RÉPONSE : En tant qu'employé ? Ma foi, je dirai qu'il se noie dans la masse. Je n'ai jamais de retour concernant une attitude déplacée.

QUESTION : Que pensez-vous du rôle de Durand dans le syndicat ?

RÉPONSE : C'est un anarchiste! Durand est un ennemi de l'ordre social, qui se fiche bien d'améliorer le sort des ouvriers ! Lui, ce qu'il veut, c'est la révolution, c'est détruire la société et la reconstruire à ses idées !

QUESTION : Oui je vois, et de la grève qu'en pensez-vous ?

REPONSE : Pff, perte de temps ! Une véritable perte de temps. Vous vous souvenez de la grève de juillet 1900 ? Ils réclamaient une meilleure répartition de la journée de travail, et on leur a accordé dix minutes supplémentaires pour se rafraîchir … autrement dit, pour se saouler un peu plus ! Nous avons déjà connu ce genre de situation alors Durand  ou pas Durand …

QUESTION : Le croyez vous capable d'un tel acte ? Faire voter la mort d'une personne ?

RÉPONSE : Je crois un anarchiste capable du pire, monsieur le juge.

QUESTION : Et les frères Boyer ?
REPONSE : Peut être un moins virulents mais anarchistes également. Durand a des complices.
QUESTION : Merci, monsieur Ducrot, vous pouvez disposer.

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

Procès verbal d'enquête émanant du Commissaire Henry

 

Deux débitants du quartier du palais de justice proche des lieux de l’agression dont fut victime le chef de bordée Louis Dongé, m’ont confirmé le fait que ce dernier était bien en possession d’un revolver le jour où il a été assailli. Il s’agit du sieur Legouis Marcel, établi quai d’Orléans, et de Madame Veuve Leroy, restauratrice rue Marie-Thérèse. Ces deux témoins ont affirmé que Dongé avait, dans leur établissement, exhibé un revolver.

D’autre part, comme suite à votre demande, après les déclarations du témoin Yves Floch, nous avons retrouvé le sieur Lemâle Achille, journalier. Ce dernier, interrogé, nous a déclaré que Yves Floch lui avait bien remis, le soir du meurtre, un revolver qu’aurait dissimulé Couillandre après l’avoir pris des mains du chef de bordée Dongé. Cet échange a eu lieu chez un débitant, le sieur Arquis Emile, établi rue Saint Jacques, numéro 17.

Floch aurait dit à Lemâle qu’il reviendrait plus tard récupérer l’arme; mais le lendemain, n’ayant pas revu son compagnon, ennuyé d’être en possession du revolver qui le gênait, car il craignait d’être impliqué dans l’affaire, il décida de s’en débarrasser. Se trouvant quai de New York pour l’embauchage et profitant qu’il était seul, Lemâle affirme avoir jeté l’arme dans le bassin de l’Eure. Ces faits ont été confirmés par Yves Floch.(Voir dépositions ci-jointes)

Madame Veuve Dongé a par ailleurs affirmé n’avoir jamais vu son époux en possession de ce revolver.


Pourtant nos recherches ont permis d’établir que cette arme, de petit calibre, guère dangereuse, avait été achetée le 25 août chez le sieur Demay, armurier établi rue de Paris, par un nommé Béblond Théophile, charbonnier, ami de la victime employé de la Compagnie générale transatlantique et beau frère du sieur Eugène Foucques, contremaître à la même compagnie. Pour mémoire, je me permets de vous signaler que Leblond et Foucques sont deux des témoins à charge ayant accusé Durand et les frères Boyer d’être les instigateurs du meurtre de Dongé.»

Le Havre, le 24 septembre 1910

Le Commissaire chef de la Sureté : Henry

 

 

RENSEIGNEMENTS

 

 

Prévenu:

 

 

 

 

    IDENTITE

Nom : Durand       Prénoms : Jules, Gustave         Age: 30 ans

Date de naissance : le lundi 6 septembre 1880, 71 rue Thibault au Havre à 3 heures du soir

 

 

 

 

     DOMICILE

Adresse :  51 quai de Saône , Le Havre

 

 

Téléphone:

 

 

 

 

     SITUATION DE FAMILLE

                                                                                                    Divorcé. En couple.

Aucun enfant.

Vit chez ses parents avec une nouvelle conjointe.

 

 

 

 

     SITUATION PROFESSIONNELLE

 

Ouvrier charbonnier

 

 

 

 

     ETUDES-SITUATION MILITAIRE

 

Niveau d'études: primaire

Diplômes: sait lire et écrire

Divers : Réformé au service militaire pour affection pulmonaire

 

 

 

 

 

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

        

MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR  

        

DIRECTION GÉNÉRALE DE LA POLICE

 

 

AFFAIRE

M/ DONGE Louis

 

 

OBJET

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

AUDITION DE DURAND Jules

 

                      PROCES-VERBAL

 

 

   L'AN mil neuf cent dix le 22 septembre

   À : onze heures 00

 

     NOUS, Commissaire Henry

                 Chef de la Sûreté

 

 Officier de police en résidence à : LE HAVRE

 

_ _ _ SUR SON IDENTITÉ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

_ _ _ „Je me nomme Durand, Jules, Gustave“_ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis né le 6/10/1880 à LE HAVRE“_ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis de nationalité FRANÇAISE“_ _ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis ouvrier charbonnier“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis domicilié au 51 quai de Saône à LE HAVRE“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

_ _ _ SUR LES FAITS _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

QUESTION: Bien, monsieur Durand. J'ai quelques questions à vous poser. Mais auparavant je tenais à ce que vous sachiez que je ne pense pas que vous soyez coupable. Vous n'avez pas le profil de l'assassin, et de plus vous n'avez aucun antécédents. Cependant vous restez une énigme pour moi. Comment se fait-il, que vous, jeune homme dont l'instruction permettait d'aspirer à un métier plus gratifiant que celui de charbonnier ayez choisi de vous engager dans cette voie ?

RÉPONSE : Je dirai par idéalisme. Certaines causes méritent que l'on s'intéresse de plus près à elles.

QUESTION : Vous aviez parler de le « supprimer » ?

RÉPONSE : Du syndicat suite à une bagarre qui avait mal tourné au cours d'une assemblée générale.

QUESTION : Bien, une question qui peut sembler déplacée. M'assurez vous, monsieur Durand de votre innocence ?

RÉPONSE : Bien évidemment, monsieur le commissaire.

QUESTION : Très bien, je vais également interroger les autres prévenus. Vous pouvez disposer, monsieur Durand mais je ne crois pas coupable étant donné que les preuves fournies ne paraissent pas entièrement fiables.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 


RENSEIGNEMENTS

Prévenu :

 

 

 

 

    IDENTITE

Nom : Boyer   Prénoms :  Louis, Gaston        Age: 31 ans

Date de naissance : 25 mars 1879 à Saint Romain de Colbosc

 

 

 

 

     DOMICILE

Adresse : 23 rue Dumont d’Urville, Le Havre

 

 

Téléphone: 

 

 

 

 

     SITUATION DE FAMILLE

                                                                                                    Marié.

3 enfants de 1 an, 3 ans et 6 ans. Tous sont à sa charge.

 

 

 

 

     SITUATION PROFESSIONNELLE

 

Ouvrier charbonnier

 

 

 

 

     ETUDES-SITUATION MILITAIRE

 

Niveau d'études: primaire

Diplômes: ne sait pas lire et écrire

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

        

MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR  

        

DIRECTION GÉNÉRALE DE LA POLICE

 

 

AFFAIRE

M/ DONGE Louis

 

 

OBJET

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

AUDITION DE BOYER Louis

 

                  

                      PROCES-VERBAL

 

   L'AN mil neuf cent dix le 22 septembre

   À : onze heures 30

 

     NOUS, Commissaire Henry

                 Chef de la Sûreté

 

 Officier de police en résidence à : LE HAVRE

 

_ _ _ SUR SON IDENTITÉ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

_ _ _ „Je me nomme Boyer, Louis, Gaston“_ _ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis né le 25/03/1879 à SAINT ROMAIN DE COLBOSC“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ __ _ _

_ _ _ „Je suis de nationalité FRANÇAISE“_ _ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis ouvrier charbonnier“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis domicilié au 23 rue Dumont d'Urville à LE HAVRE“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

_ _ _ SUR LES FAITS _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

QUESTION: Bien, monsieur Boyer. J'ai quelques questions à vous poser. Niez-vous de quelques façons que cela soit avoir incité au meurtre de Dongé vous ou vos acolytes ?

RÉPONSE : Oui , monsieur le commissaire nous sommes innocents de ce dont nous sommes accusé !

QUESTION : Pourriez en toute objectivité me peindre un portrait de Durand, le secrétaire ?

RÉPONSE : Durand est un orateur passionné, dévoué à la cause des charbonniers. Je ne connais pas très bien son passé, je sais juste qu'il est né dans une famille honnête de travailleurs. Je sais également que sa femme l'a largué pour un autre car il était trop impliqués dans cette cause. C'est vrai qu'il ne s'arrête jamais. Mais il ne ferait pas de mal à une mouche, il est pacifique, militant à la Ligue des Droits de l'Homme. On le surnomme le buveur d'eau.

QUESTION : Et de Dongé, qu'en pensez-vous ?

RÉPONSE : Dongé était un minable, une brute alcoolique, qui avait abandonné sa femme et ses trois filles. Et cd n'est un secret pour personne. Cependant, je reste persuadé que cette bagarre n'est ni plus ni moins qu'une vulgaire bagarre d'alcooliques.

QUESTION : Merci, monsieur Boyer, vous pouvez disposer

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 


RENSEIGNEMENTS

Prévenu :

 

 

 

 

    IDENTITE

Nom : Boyer   Prénoms : Ernest, Henri    Age: 33 ans

Date de naissance : 4 septembre 1877 à Saint Aubin Routot

 

 

 

 

     DOMICILE

Adresse : 43 rue de Montivilliers, Le Havre

 

 

Téléphone: 

 

 

 

 

     SITUATION DE FAMILLE

                                                                                                    Marié.

2 enfants de 3 ans et 6 ans. Tous sont à sa charge.

 

 

 

 

     SITUATION PROFESSIONNELLE

 

Ouvrier charbonnier

 

 

 

 

     ETUDES-SITUATION MILITAIRE

 

Niveau d'études: primaire

Diplômes: ne sait pas lire et écrire

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

        

MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR  

        

DIRECTION GÉNÉRALE DE LA POLICE

 

 

AFFAIRE

M/ DONGE Louis

 

 

OBJET

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

AUDITION DE BOYER Ernest

 

                      PROCES-VERBAL

 

 

   L'AN mil neuf cent dix le 22 septembre

   À : douze heures 00

 

     NOUS, Commissaire Henry

                 Chef de la Sûreté

 

 Officier de police en résidence à : LE HAVRE

 

_ _ _ SUR SON IDENTITÉ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

_ _ _ „Je me nomme Boyer, Ernest, Henri“_ _ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis né le 04/10/1877 à SAINT AUBIN ROUTOT“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ __ _ _

_ _ _ „Je suis de nationalité FRANÇAISE“_ _ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis ouvrier charbonnier“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis domicilié au 43 rue de Montivilliers à LE HAVRE“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

_ _ _ SUR LES FAITS _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

QUESTION: Bien, monsieur Boyer. J'ai quelques questions à vous poser. Niez-vous de quelques façons que cela soit avoir incité au meurtre de Dongé vous ou vos acolytes ?

RÉPONSE : Oui , monsieur le commissaire ? Je suis innocent, je n'ai jamais incité au meurtre de Dongé ni de personne d'ailleurs !

QUESTION : Pourriez en toute objectivité me peindre un portrait de Durand, le secrétaire ?

RÉPONSE : Durand ? Oh Durand est un paradoxe vivant ! Sous ses airs de petit bonhomme insignifiant se cache un orateur passioné avec de grandes ambitions. Il veut faire en sorte que les charbonniers aient une meilleure image et a pour cela commencé à réorganiser le syndicat. C'est une personne bien . On le surnomme le « curé » sur le port ou encore le « buveur d'eau » car il ne met jamais les pieds au café étant membre de la Ligue Antialcoolique

QUESTION : Et de Dongé, qu'en pensez-vous ?

RÉPONSE : Dongé était tout l'inverse. Cette brute alcoolique était père de trois enfants qu'il avait abandonnés ainsi que sa femme. Je ne l'appréciait pas beaucoup mais jamais je ne l'aurais fait supprimer.

QUESTION : Merci, monsieur Boyer, vous pouvez disposer

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 


RENSEIGNEMENTS

 

Prévenu :

 

 

 

 

 

    IDENTITE

Nom : Mathieu     Prénoms : Edmond, Albert          Age: 43 ans

Date de naissance :  2 mars 1867 à Lisieux

 

 

 

 

     DOMICILE

Adresse :  4 rue Michel Yvon, Le Havre

 

 

Téléphone: 

 

 

 

 

     SITUATION DE FAMILLE

                                                                                                    Célibataire.

Aucun enfant.

 

 

 

 

     SITUATION PROFESSIONNELLE

 

Ouvrier charbonnier

 

 

 

 

     ETUDES-SITUATION MILITAIRE

 

Niveau d'études: primaire

Diplômes: ne sait pas lire et écrire

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

        

MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR  

        

DIRECTION GÉNÉRALE DE LA POLICE

 

 

AFFAIRE

M/ DONGE Louis

 

 

OBJET

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

AUDITION DE MATHIEU Edmond

 

                      PROCES-VERBAL

 

 

 

 

   L'AN mil neuf cent dix le 22 septembre

   À : quatorze heures 00

 

     NOUS, Commissaire Henry

                 Chef de la Sûreté

 

 Officier de police en résidence à : LE HAVRE

 

_ _ _ SUR SON IDENTITÉ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

_ _ _ „Je me nomme Mathieu, Edmond, Albert“_ _ _ _  _ _ _ „Je suis né le 02/03/1867 à LISIEUX“_ _ _ _ _

_ _ _ „Je suis de nationalité FRANÇAISE“_ _ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis ouvrier charbonnier“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis domicilié au 4 rue Michel Yvon à LE HAVRE“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

_ _ _ SUR LES FAITS _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

QUESTION: Bien, pourriez-vous me raconter avec le plus de précision les faits du 9 septembre dernier ?

RÉPONSE : Nous étions avec les autres quai d'Orléans. Je dis pas qu'on étaient parfaitement frais mais on embêtait personne. Puis ce vaurien de Dongé est arrivé. Oh pour ça il avait bu. Il tenait un revolver et faisait le fier avec son nouveau joujou. Au début on se marrait puis on en a eu marre. On lui a dit de dégager mais il restait planté là à nous menacer, les premiers coups sont partis je voulais pas le tuer mais c'était pour me défendre !

QUESTION : Et le « joujou » en question, vous l'aviez déjà vu ?

RÉPONSE : non mais je suis sûr qu'il appartenait pas à Dongé . Ça doit coûter une fortune ces machins-là .

QUESTION : Vous faites partie du syndicats des char

bonniers. Avez-vous vu ou entendu les frères Boyer ou Durand, le secrétaire faire voter la mort de Dongé dans une assemblée ?
RÉPONSE : Non, jamais.

QUESTION : Merci, vous pouvez disposer.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 


RENSEIGNEMENTS

Prévenu :

 

 

 

 

 

    IDENTITE

Nom : Couillandre   Prénoms : François, Guillaume   Age: 31 ans

Date de naissance : 14 mai 1879, à Pont -Croix (Quimper)

 

 

 

 

     DOMICILE

Adresse : 27 rue Guillaume Letestu, Le Havre

 

 

Téléphone: 

 

 

 

 

     SITUATION DE FAMILLE

                                                                                                    Marié.

5 enfants, âgé de 4 à 12 ans. Tous sont à sa charge.

 

 

 

 

     SITUATION PROFESSIONNELLE

 

Ouvrier charbonnier

 

 

 

 

     ETUDES-SITUATION MILITAIRE

 

Niveau d'études: primaire

Diplômes: ne sait pas lire et écrire

 

 

 

 

 

 

 

               

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

        

MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR  

        

DIRECTION GÉNÉRALE DE LA POLICE

 

 

AFFAIRE

M/ DONGE Louis

 

 

OBJET

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

AUDITION DE COUILLANDRE François

 

                      PROCES-VERBAL

 

   L'AN mil neuf cent dix le 22 septembre

   À : quatorze heures 30

 

     NOUS, Commissaire Henry

                 Chef de la Sûreté

 

 Officier de police en résidence à : LE HAVRE

 

_ _ _ SUR SON IDENTITÉ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

_ _ _ „Je me nomme Couillandre, François, Guillaume“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _   _ _ _ „Je suis né le 14/05/1879 à PONT-CROIX (QUIMPER)“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

_ _ _ „Je suis de nationalité FRANÇAISE“_ _ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis ouvrier charbonnier“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis domicilié au 27 rue Guillaume Letestu à LE HAVRE“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

_ _ _ SUR LES FAITS _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

QUESTION: Bien, pourriez-vous me raconter avec le plus de précision les faits du 9 septembre dernier ?

RÉPONSE : On était sur le port quai d'Orléans plus exactement. On s'amusait un peu …

QUESTION : Vous vouliez dire par là que vous vous soûliez ?
RÉPONSE : oui c'est ça et ce salaud de Dongé est arrivé. Oh, il croyait intelligent avec ce revolver qu'il avait dû voler. Et il nous a menacé soûl qu’il était. Il nous lâchait plus et on lui a dit de partir mais il restait là à nous insulter. Alors on s'est dit que ça commençait à bien faire et la bagarre a éclaté. Les coups sont partis mais cette mort est tout à fait involontaire, monsieur le commissaire.

QUESTION : Vous dîtes qu'il avait sans doute voler ce revolver . Qu'est-ce-qui vous fait penser cela ?

RÉPONSE : Oh Dongé était un sacré voleur, tout le monde le sait mais c'était surtout un lâche qui avait abandonné sa femme et ses enfants. Le revolver , il aurait jamais pu se le payer.

QUESTION : Un ami peut-être ?

RÉPONSE : Je me demande bien si des types comme lui peuvent avoir des amis.

QUESTION : Bien , avez-vous vu ou entendu les frères Boyer ou Durand faire voter la mort de Dongé lors d'une assemblée ?

RÉPONSE : Non, jamais.

QUESTION : Ce sera tout. Vous pouvez disposer.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 


RENSEIGNEMENTS

 

Prévenu :

 

 

 

 

    IDENTITE

Nom : Lefrançois   Prénoms : Charles, Onésiphore    Age:  28 ans

Date de naissance : 25 février 1882, au Havre

 

 

 

 

     DOMICILE

Adresse : 49 rue Berthelot, Le Havre

 

 

Téléphone: 

 

 

 

 

     SITUATION DE FAMILLE

                                                                                                    Divorcé.

1 enfant, âgé de 8 ans. Plus aucun n'est à sa charge.

 

 

 

 

     SITUATION PROFESSIONNELLE

 

Ouvrier charbonnier

 

 

 

 

     ETUDES-SITUATION MILITAIRE

 

Niveau d'études: primaire

Diplômes: ne sait pas lire et écrire

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

        

MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR  

        

DIRECTION GÉNÉRALE DE LA POLICE

 

 

AFFAIRE

M/ DONGE Louis

 

 

OBJET

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

AUDITION DE LEFRANCOIS Charles

 

                      PROCES-VERBAL

 

   L'AN mil neuf cent dix le 22 septembre

   À : quinze heures 00

 

     NOUS, Commissaire Henry

                 Chef de la Sûreté

 

 Officier de police en résidence à : LE HAVRE

 

_ _ _ SUR SON IDENTITÉ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

_ _ _ „Je me nomme Lefrançois, Charles, Onésiphore“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _  _ _ _ „Je suis né le 25/02/1882 à LE HAVRE“_ _ _ _

_ _ _ „Je suis de nationalité FRANÇAISE“_ _ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis ouvrier charbonnier“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis domicilié au 49 rue Berthelot à LE HAVRE“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

_ _ _ SUR LES FAITS _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

QUESTION: Bien, pourriez-vous me raconter avec le plus de précision les faits du 9 septembre dernier ?

RÉPONSE : Bah vous savez … Je … Nous étions sur le quai d'Orléans, un peu soûls comme qui dirait. Puis, Dongé est arrivé et nous a menacé avec un revolver qui ne sortait de je ne sais où. Toujours utilise que celui qui se fait passer pour la victime dans cette affaire est en fait un homme qui nous menaçaient les copains et moi. On lui a dit de partir, mais il était complètement ivre. Alors on s'est défendu, qu'est-ce que vous auriez fait à notre place ? On voulait pas le tuer mais les bagarres on sait pourquoi ça commence mais on s'est pas comment ça se termine !

QUESTION : une idée de l'endroit où il a pu se procurer un revolver ?

RÉPONSE : Non, mais en tout c'était pas à lui.

QUESTION : Vous faites il me semble partie du syndicat des charbonniers ?

RÉPONSE : c'est exact.

QUESTION : Est-il vrai que Durand et les frères Boyer ont  fait voter la mort de Dongé ?

RÉPONSE : Non , ce traître a provoqué sa propre mort.

QUESTION : Merci, ce sera tout. Vous pouvez disposer.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 


RENSEIGNEMENTS

 

Prévenu :

 

 

 

 

    IDENTITE

Nom : Bauzin   Prénoms : Adolphe, François     Age: 34 ans

Date de naissance : 16 avril 1876, au Havre

 

 

 

 

     DOMICILE

Adresse : 26 rue de Turenne, Le Havre

 

 

Téléphone: 

 

 

 

 

     SITUATION DE FAMILLE

                                                                                                    Marié.

2 enfants de 4 et 6 ans. Tous sont à sa charge.

 

 

 

 

     SITUATION PROFESSIONNELLE

 

Ouvrier charbonnier

 

 

 

 

     ETUDES-SITUATION MILITAIRE

 

Niveau d'études: primaire

Diplômes: ne sait pas lire et écrire

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

        

MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR  

        

DIRECTION GÉNÉRALE DE LA POLICE

 

 

AFFAIRE

M/ DONGE Louis

 

 

OBJET

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

AUDITION DE BAUZIN Adolphe

 

                      PROCES-VERBAL

 

 

   L'AN mil neuf cent dix le 22 septembre

   À : quinze heures 30

 

     NOUS, Commissaire Henry

                 Chef de la Sûreté

 

 Officier de police en résidence à : LE HAVRE

 

_ _ _ SUR SON IDENTITÉ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

_ _ _ „Je me nomme Bauzin, Adolphe, François“_ _ _  _ _ _ „Je suis né le 16/04/1876 à LE HAVRE“_ _ _ _

_ _ _ „Je suis de nationalité FRANÇAISE“_ _ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis ouvrier charbonnier“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis domicilié au 26 rue de Turenne à LE HAVRE“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

_ _ _ SUR LES FAITS _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

QUESTION: Bien, vous avez été impliqué dans cette affaires à la suite de témoignages hasardeux. Reconnaissez-vous avoir participé à cette bagarre

RÉPONSE : Non, monsieur le commissaire, j'étais chez moi avec ma femme et mes deux enfants.

QUESTION : Vous en êtes sûr ?

RÉPONSE : Absolument certain !

QUESTION : Poursuivons. Si vous n'avez pas fait partie de cette rixe, vous faites en revanche partie du syndicat des charbonniers. Que pensez-vous des frères Boyer et de Jules Durand.
RÉPONSE : Des victimes, ce sont des victimes tout comme moi. Ce sont de braves gars avec des ambitions honorables. Vous voulez que je vous donne mon avis ? Ça doit pas être facile tous les jours de calmer une bade d'excités comme les charbonniers. Ils veulent redorer notre blason et je leur souhaite bien du courage.

QUESTION : Les avez-vous vu ou entendu lors d'une assemblée générale faire voter la mort de Dongé ?

RÉPONSE : Non, jamais et je peux vous le dire car je rate jamais une seule assemblée.

QUESTION : Merci, vous pouvez disposer.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

                     

 

 

 

 

                      PROCES-VERBAL

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

        

MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR  

        

DIRECTION GÉNÉRALE DE LA POLICE

 

 

AFFAIRE

M/ DONGE Louis

 

 

OBJET

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

AUDITION DE GEEROMS Camille

   L'AN mil neuf cent dix le 28 septembre

   À : quinze heures 30

 

     NOUS, Commissaire Henry

                 Chef de la Sûreté

 

 Officier de police en résidence à : LE HAVRE

 

_ _ _ SUR SON IDENTITÉ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

_ _ _ „Je me nomme Geeroms, Camille, Luc“_ _ _ _ _  _ _ _ „Je suis né le 09/11/1871 à FACHE“_ _ _ _

_ _ _ „Je suis de nationalité FRANÇAISE“_ _ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis ouvrier mouleur“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis domicilié au 25 rue Victor Hugo à PARIS“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

_ _ _ SUR LES FAITS _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

QUESTION: Bien monsieur Geeroms, pourriez-vous me donner la nature de vos relations avec Jules Durand ?

RÉPONSE : Mais c'est très simple, elles sont purement professionnelles. Nous travaillons Durand et moi, pour faire entendre auprès des patrons nos revendications.

QUESTION : Très bien, alors de coté les détails purement politiques pour s'intéresser davantage à la personnalité de Jules Durand. Comment est-il ?

RÉPONSE : Pas très bavard sur sa vie personnelle mais il peut vous tenir un discours pendant des heures sur l'exploitation des ouvriers par leurs patrons. Il est comme ça Jules, il voudrait changer le monde je lui dis souvent de pas trop rêver, de garder les pieds sur terre. Il y a un réel contraste : ce petit bonhomme taciturne se mue en orateur passionné lorsqu'il prend la parole pour défendre ses camarades.
QUESTION : Même si vous ne parlez pas tellement en dehors du syndicat, pensez qu'il aurait été capable de faire voter la mort de Dongé ?

REPONSE : Non, c'est un défenseur de la ligue des Droits de l'Homme, un buveur d'eau, pacifiste. Non, franchement je suis sûr que jamais Durand n'aurait fait une chose pareille. C'est impossible.

QUESTION : Et les frères Boyer, qu'en pensez-vous ?
REPONSE : Je persuadé de leur innocence également .
QUESTION : Merci, monsieur Geeroms, vous pouvez disposer.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

 

 


RENSEIGNEMENTS

 

Témoin:

 

 

 

 

    IDENTITE

Nom : Ducrot   Prénoms : Stanislas, Marie       Age: 57 ans

Date de naissance : 19 juin 1853 à PARIS

 

 

 

 

     DOMICILE

Adresse : 45 rue d'Ingouville, LE HAVRE

 

 

Téléphone: 

 

 

 

 

     SITUATION DE FAMILLE

                                                                                                    Marié.

Aucun enfant.

 

 

 

 

     SITUATION PROFESSIONNELLE

 

Agent général de la Compagnie Générale Transatlantique

 

 

 

 

     ETUDES-SITUATION MILITAIRE

 

Niveau d'études: élevé

Diplômes: sait lire et écrire

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

        

MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR  

        

DIRECTION GÉNÉRALE DE LA POLICE

 

 

AFFAIRE

M/ DONGE Louis

 

 

OBJET

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

AUDITION DE DUCROT Stanislas

 

                      PROCES-VERBAL

 

 

 

   L'AN mil neuf cent dix le 28 septembre

   À : seize heures 30

 

     NOUS, Commissaire Henry

                 Chef de la Sûreté

 

 Officier de police en résidence à : LE HAVRE

 

_ _ _ SUR SON IDENTITÉ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

_ _ _ „Je me nomme DUCROT, Stanislas, Marie“_ _ _ _ _ _ _ „Je suis né le 18/06/1853 à PARIS “_ _ _ _

_ _ _ „Je suis de nationalité FRANÇAISE“_ _ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis agent général de la Compagnie Générale Transatlantique“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ „Je suis domicilié au 45 rue d'Ingouville à LE HAVRE“_ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

_ _ _ SUR LES FAITS _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _ _

 

QUESTION: Bien monsieur Ducrot, que pensez-vous de Durand en tant qu'employé j'entends ?

REPONSE : J'ai déjà été convoqué chez le juge. Est-il vraiment nécessaire que je réponde à nouveau aux mêmes questions ?
QUESTION : Oui, ça l'est.
REPONSE : Eh bien, comme je l'ai dit précédemment je n'ai jamais eu d'informations négatives concernant Durand. Je crois qu'il fait correctement son travail même si son incitation à la grève me déplaît fortement. 

QUESTION : Et le croyez vous capable d'avoir fait voter la mort de Dongé ?

REPONSE : Bien sûr, je suis même certain qu'il l'a fait. Ce dernier, resté dans le droit chemin, m'empêchait d'avancer dans ses idées révolutionnaires.

QUESTION : Mais il est pacifique et adhérant à la ligue des Droits de l'Homme …

REPONSE : ah, ces bêleurs de paix ! Ils mêlent de tout et donne des leçons de morales à tout le monde. Durand est un anarchiste, j'en suis certain. Et les anarchistes sont la gangrène du monde ouvrier ! Et ces pauvres gens qui se laissent entraîner … Vous avez vu les dernières grèves dans les mines du Nord ? Une émeute, une vraie émeute ! Ils ont pillé les maisons, les usines, les banques même ! L'armée a été obliger de tirer.
QUESTION : Oui … Monsieur Ducrot, la victime

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

possédait le soir du meurtre un revolver. Revolver qu'elle ne possédait pas d'ordinaire. Auriez-vous une idée d'où elle aurait pu se la procurer ?
REPONSE : Je n'en sais rien et si vous insinuez que nous fournissons des armes à nos employés eh bien c'est faux ! Nous ne sommes pas une compagnie d'armement !

QUESTION : Oui bien sûr, ce sera tout monsieur Ducrot, vous pouvez disposer.

 

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

        

MINISTÈRE DE L’INTÉRIEUR  

        

DIRECTION GÉNÉRALE DE LA POLICE

 

 

AFFAIRE

M/ DONGE Louis

 

 

OBJET

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

AUDITION DE DUCROT Stanislas

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 


RENSEIGNEMENTS

 

 

 

Victime :

 

 

 

 

    IDENTITE

Nom : Dongé   Prénoms : Louis       Age: 40 ans

Date de naissance : le 5 août 1970 à LE HAVRE

 

 

 

 

     DOMICILE

Adresse : 1 boulevard Amiral Mouchez, LE HAVRE

 

 

Téléphone: 

 

 

 

 

     SITUATION DE FAMILLE

                                                                                                    Marié.

Père de trois enfants qu'il a abandonné ainsi que sa femme.

 

 

 

 

     SITUATION PROFESSIONNELLE

 

Chef de bordée à la Compagnie Générale Transatlantique

 

 

 

 

     ETUDES-SITUATION MILITAIRE

 

Niveau d'études: primaire

Diplômes: ne sait pas lire et écrire

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

2/ Renseignements divers et personnalité

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Milieu de vie et conditions de travail

 

     Les charbonniers forment deux catégories :

     La première est les hommes travaillant à bord, au déchargement du charbon, ils travaillent en moyenne trois jours la semaine. Ils sont payés  9 francs par jour ou plus exactement  4,50 francs par vacation de 4 heures de travail, ce qui leur fait des semaines d'environ 27 francs.

     Les « crapauds », sortes de bennes automatiques, se chargeant toutes seules, réduise le travail des charbonniers augmentant ainsi le chomâge considérablement.

     Aussi, ces charbonniers pour la plupart des déclassés, sont obligés de dormir dans des wagons et de vivre au petit bonheur. Un fourneau électrique est installé sur les quais, leur permet de se restaurer avec quelques sous. Contraints de vivre dans de pareilles conditions, il n’est pas surprenant que cette corporation compte 90 % d’alcooliques.

     L’autre catégorie de charbonniers est formée des ouvriers du chantier. Leur travail consiste à mettre le charbon en sacs et à le livrer en ville. D’autres sont occupés à faire des mélanges et à fabriquer mécaniquement des briquettes. Ceux-là travaillent 6 jours par  semaine et gagnent 5,50 francs par jour.

     Alors que la tension sociale est déjà grande au Havre en août 1910, les armateurs décident, pour améliorer la productivité, d'investir dans un nouvel appareil électrique monté sur un portique, baptisé "Tancarville", permettant, grâce à son système de chaînes à godets, de multiplier par 5 les cadences de déchargement du charbon.

     Dans ce climat social tendu, les ouvriers vont vouloir faire entendre leurs voix en dénonçant la vie chère, en revendiquant l'augmentation dees salaires et en refusant l'utilisation du "Tancarville", synonyme de chômage.Les revendications furent étudiées. Finalement on se prononça pour les suivantes :

1° 10 francs par jour pour les déchargeurs

2° 6 francs pour les ouvriers des chantiers

3° la suppression du fourneau économique

4° l’installation d’une salle de douches chaudes pour se nettoyer

     Le 17 août, c'est le rejet par la Compagnie Générale Transatlantique des "revendications auxquelles il n'a pas été possible de donner suite". En présence de 600 charbonniers, l'assemblée générale du syndicat des charbonniers constate le refus patronal et vote l'appel à la grève. Au terme des débats internes, les grévistes affirment être finalement d'accord pour travailler avec le "Tancarville" sous réserve de primes pour les charbonniers.

     Les négociants en charbon décident alors de faire apposer sur les murs une affiche patronale qui va attiser le conflit, équivalent à un lock-out patronal : " A l'avenir, l'embauche ne se fera qu'à la condition rigoureuse d'une garantie de travil effectif." Du coup, la grève s'étend au-delà de la seule Compagnie Générale Transatlantique à tous les importateurs de charbon. Le port du Havre est vite bloqué ...

 

 

Enquêtes de personnalité

 

JULES DURAND

 Né dans une famille honorable, avec des parents attentionnés. La mère tient un commerce, le père est un honnête travailleur, chef d'équipe aux Docks et Entrepôts, très apprécié de la direction, "ouvrier modèle".

Son père souhaitait qu'il devienne artisan et lui ne veut pas faire d'études. Ainsi, après l'école primaire, il lui trouve une place d'apprenti chez un sellier-bourrelier à 14 ans, mais ce n'est pas ce qu'il souhaitait. Il se rattrape plus tard avec ses cours du soir dans une université populaire qui doit " élever la culture et la conscience des syndiqués". Puis, son père le fait entrer aux Docks et Entrepôts où il devient trésorier, mais il est licencié pour propagande et actions syndicales en 1908. On lui propose des places dans les bureaux, mais cela ne lui convient pas. En réalité, il refuse beaucoup de situations intéressantes pour finir volontairement sur les quais. Il choisit d'être  ouvrier charbonnier et débute comme simple journalier d'appoint. Ensuite, il devient chef de bordée et en 1910, il prend la tête du syndicat ouvrier des charbonniers du port du Havre qu'il réorganise en rupture avec le corporatisme.

C'est un idéaliste, pacifiste qui milite à la ligue des Droits de l'Homme.

Il n'a pas fait son service militaire car il a été réformé pour affection pulmonaire.

C'est un petit bonhomme insignifiant aux traits mous, aux cheveux frisotés et à la moustache finement taillée. Toujours bien vêtu. Allure de curé.

Il est totalement sobre, ne met jamais les pieds dans un café et est adhérant de Ligue antialcoolique.

Toujours soucieux d'aider son prochain quitte à délaisser ses proches. Sa femme l'a donc quitté pour un autre.

 

Edmond Mathieu

 

L'auteur des coups mortels vien d'une famille modeste de Lisieux où ses parents tenaient un petit commerce. A 15 ans, il est envoyé chez son oncle au Havre afin d'y trouver du travail. Il est embauché à la veille de ses 17 ans par la Compagnie générale transatlantique où il travaille maintenant depuis 26 ans. C'est un bon ouvrier.

Il vit seul, sans enfant et est alcoolique. Il est également adhérant au syndicat des charbonniers. Il n'est pas violent mais ne supporte pas les patrons et leurs mouchards qui je cite "ne pense qu'à s'en mettre plein les poches et s'en foutent pas mal qu'on crève".

 

 

 

 

 

Les prévenus

 

Les prévenus sont des honnêtes travailleurs, quoique alcoolique tout de même. Ils sont adhérents du syndicat des charbonniers. Ils vivent dans des conditions précaires.

 

Louis Dongé

 

Dongé était une brute alcoolique. Père de 3 enfants, il avait abandonné sa femme et ses enfants.Ivrogne,voleur,sans conscience, sans intelligence

, sans conversation,il avait toutes les qualités de chef de bordée à la Compagnie Transatlantique.

 

CAMILLE GEEROMS

 

Il devient secrétaire du syndicat des mouleurs du Havre en 1906 ; Il est le fondateur du journal Vérités, organe de l’Union des Syndicats du Havre et de la Région ; Membre du groupe libertaire depuis 1908, il est élu secrétaire de l’Union des Syndicats du Havre et de la Région en 1910.

 

STANISLAS DUCROT

 

Il entre dans la Marine en 1870 et est promu Lieutenant de vaisseau en 1883. Le 15 mars 1891, il est détaché en congé sans solde et hors cadre à la Compagnie générale transatlantique. Il est fait Chevalier de la Légion d'Honneur le 18 novembre 1884 et Officier de la Légion d'Honneur le 22 janvier 1905.